Regards croisés : Rapport de la journée au Théâtre de Liège – 19.02.24

En 2024, Pulse Transitienetwerk, EventChange et Rab/bko organisent, dans le cadre de SamenDurable, trois activités bicommunautaires et interrégionales pour les acteur·ice·s culturel·le·s réparties en Flandres, en Wallonie et à Bruxelles. Le but est de briser les silos, d’échanger idées et réflexion critique mais aussi de diffuser et traduire en français et en néerlandais les initiatives, les outils et les méthodes en matière de durabilité dans le secteur culturel belge.

Le lundi 19 février a eu lieu la première rencontre au Théâtre de Liège qui a rassemblé 32 participant.e.s. du secteur culturel francophone et néerlandophone.

La rencontre a commencé par une brève introduction par EventChange et Pulse pour ensuite donner la parole à trois artistes qui suivent le cycle des trois journées : Léa Tarral du Collectif 3e Vague, Christophe Meierhans et Jeff De Maeyer. Iels ont chacun·e expliqué de quelle façon la question écologique a influencé leur travail et comment cette préoccupation a commencé à prendre de l’importance dans leurs pratiques artistiques.

Le regard de ces artistes sur l’intégralité du cycle est essentiel non seulement pour favoriser le dialogue et les échanges entre créations et institutions mais aussi pour apporter une vision, parfois plus radicale, absolument nécessaire au changement de paradigme.

Visite du théâtre

S’en est suivie une visite du théâtre par Nathalie Borlée, directrice technique. De la grande salle aux ateliers costumes, l’ensemble du bâtiment a été présenté dans ses différentes fonctions, ses potentialités et ses limites en matière de durabilité. Les enjeux sont parfois complexes quand il s’agit d’un bâtiment patrimonial qui dépend de la ville pour le chauffage et l’électricité. Mais un plan d’action a été acté avec cette dernière pour limiter les consommations et avoir une démarche cohérente et raisonnée. Certaines actions, tout à fait inspirantes, ont été mises en place, comme la limitation à un semi-remorque pour le transport des décors, la création de châssis modulables et reconditionnés, la nécessité d’une matériauthèque pour proposer une alternative aux matériaux impactants. 

Chantier durables : réussites et perspectives

Après un lunch au Café des Arts, Emmanuelle Lejeune, chargée de projets en durabilité, a présenté les avancées durables du théâtre. Le processus mis en place repose sur quatre axes qui s’alimentent l’un l’autre :

  • écrire et mettre en oeuvre un plan d’action durabilité
  • développer des outils pour le secteur
  • favoriser la réflexion collective et le plaidoyer
  • développer des projets artistiques

L’approche de la théorie du Donut est appliquée et la méthodologie s’appuie sur l’ETC Theatre Green Book, guide qui fournit des normes et des outils communs pour travailler de manière écologique sur trois aspects : la production, le bâtiment, les opérations. 

Pour chacune des thématiques, les actions ‘déjà réalisées’ et ‘à faire’ ont été développées. Le volet “opérations” comprend notamment tout ce qui concerne la mobilité, l’alimentation, les déchets, le numérique, les achats durables, l’inclusion et l’accessibilité. Ainsi, le théâtre a déjà réalisé un plan mobilité des publics, un partenariat avec la SNCB et la TEC, un leasing vélo pour les salarié·e·s, une charte de mobilité pour les artistes, une expérimentation de catering 100% végétarien pour les événements du théâtre, la prolongation de la durée de vie des appareils, le partage de bonnes pratiques numériques, des partenariats avec des associations locales, etc. Les initiatives sont nombreuses et s’inscrivent dans un long travail d’amélioration continue.

Parallèlement, le développement de projets artistiques durables et expérimentaux fait partie intégrante des missions du théâtre, comme par exemple A Play for the Living in A Time of Extinction, où le Collectif Mensuel s’empare du projet Théâtre Durable ? de Katie Mitchell dans l’objectif d’expérimenter un théâtre écologique, sans tournée. 

Discussions

La présentation d’Emmanuelle a suscité de nombreuses questions et échanges riches et stimulants parmi les participant·e·s. Tout d’abord, la nécessité d’insister – dans la théorie du Donut – sur le socle, l’importance de remettre en proportion et en perspective car on ne peut y arriver en l’état quand on sait que six des limites planétaires sont déjà dépassées. 

Ensuite il a été question de la méthode d’application du modèle en interne : fréquence, implication, temps, etc. Emmanuelle explique que la théorie du Donut a été introduite sous forme de workshop où toutes les équipes du théâtre étaient présentes. L’outil ETC a été présenté aux salariés, aux artistes, à la ville de Liège afin de pouvoir confronter les opinions. Un plan d’action en est alors ressorti, dont le premier document écrit a été conçu par les équipes. A partir de ce plan, la direction a fait le choix des initiatives prioritaires. Elle insiste sur l’importance de s’inspirer d’autres modèles venus d’ailleurs mais surtout de rester humble dans la démarche en publiant de manière honnête les résultats. 

Il est relevé la nécessité du soutien de la direction mais aussi l’enjeu central de la communication interne pour stimuler une culture commune. La Green Team regroupe une personne de chaque service. Une newsletter interne avec un encart “Durabilité” explique les avancées. Un petit déjeuner mensuel permet d’aborder la question par thématique (mars : charte mobilité / avril : plan accessibilité). 

Après ces échanges, trois tables de discussions thématiques ont eu lieu autour de la question suivante : “Comment formaliser nos engagements” en matière de mobilité, d’éco-conception et de livrets d’accueil des artistes. Des documents types seront traduits en NL ou FR par Pulse Transitienetwerk et EventChange, afin de favoriser le partage d’informations, la mise en commun de ressources qui peuvent être inspirantes comme point de départ ou de développement de pratiques durables. 

Plusieurs points sont ressortis de cette journée : 

  • le rôle essentiel, voire aujourd’hui indispensable, d’un·e chargé·e de projets durables dans un lieu ou une structure culturelle, 
  • la nécessité de favoriser le partage des outils, des pratiques et des méthodes, 
  • l’intérêt des formes de “laboratoire” d’essais pour faire avancer la réflexion et favoriser le rayonnement de certaines actions,
  • l’indispensable vision des artistes qui vient questionner la nécessaire radicalité des prises de position, des changements de paradigme et des remises en question fondamentale des discours actuels

Étaient présents : Museum De Mindere, Ville de Bruxelles Culture, Théâtre National, Gent Festival van Vlanderen, Théâtre Marni, Asbl Porta, Opera Ballet Vlaanderen, la Feas, Le Delta, Imagine Demain le Monde, Greentrack Gent, des étudiant.e.s de l’ULB, Musée des Transports en commun, Magazzino, Centre Culturel de Dinant, Théâtre Océan Nord, l’Atps, les artistes Léa Tarral, Jeff De Maeyer, Christophe Meierhans, Rab.bko, Pulse Transitienetwerk, EventChange.

Prochains rendez-vous à Gand, le 26 mars, puis journée de clôture à Bruxelles le 21 mai !