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  • Le Zéro Carbon Records ou l’art de réinventer les tournées musicales

    Le Zéro Carbon Records ou l’art de réinventer les tournées musicales

    Du 27 mai au 14 juin 2023, les musiciens, Manu Louis et Sylvain Chauveau, réinventent le modèle de la tournée musicale en parcourant la Belgique à vélo. Intitulé Zéro Carbon Record, ce projet s’ancre dans le contexte de l’urgence écologique. Neuf concerts constellent leur trajet à vélo en complète autonomie. Le 27 mai 2023, jour J du départ de la tournée, ils se livrent à nous …

    Des questionnements en prise avec la situation écologique actuelle

    Représentations aux quatre coins du monde, voyages express des artistes en avion, surenchère des productions de spectacles, marketing permanent, scénographies ultra-consommatrices d’énergie, impact d’un numérique grandissant, l’industrie musicale se retrouve en proie à de nouveaux questionnements dans un contexte de crise écologique. Pendant longtemps pris dans la frénésie des tournées internationales, Manu Louis et Sylvain Chauveau ont un déclic pendant le confinement. Comme de nombreuses personnes, ils se réjouissent des bonnes nouvelles découlant d’une activité humaine plus raisonnable.

    “J’ai eu un nouveau déclic, de la gravité du problème écologique et j’ai commencé à réfléchir sur ce que collectivement on était en train de faire. Je me suis aperçu qu’en tant d’artiste, on était complètement dépendant, à toutes les étapes, des hydrocarbures. Je me suis rendu compte que cette façon de faire de la musique n’est plus viable. Au bout d’un moment, la question s’est posée avec Manu : sommes-nous condamnés à ça ? Y’a-t-il une porte de sortie ? ” nous partage Sylvain Chauveau.

    Au lendemain du confinement, ils décident de faire les choses autrement et de se lancer le défi : une tournée sans électricité, sans essence et sans émission de carbone.

    La guitare sur le porte-bagages

    Nait alors l’idée du Zéro Carbon Records, il s’agit d’une part d’envisager des tournées sans électricité et d’autre part de ne faire aucune production de disques ou de diffusion en ligne. Du 27 mai au 14 juin 2023, les artistes se lancent dans une tournée pilote. C’est aux côtés de leurs vélos chargés de leur matériel de tournée que les artistes expliquent leur démarche :

    “Notre conviction à tous les deux, c‘est que l’industrie musicale telle qu’elle est aujourd’hui va s’arrêter, soit par épuisement des ressources en métaux et en énergie qui la font tourner, soit parce qu’il y aura une prise de conscience du problème climatique de plus en plus aiguë et qu’on va décider de freiner sur les usages. Dans tous les cas, ça ne pourra plus continuer. Quand est-ce qu’on commence à se préparer à cela ? Nous, d’une certaine manière, on veut dire : commençons à se préparer à ça.”

    Ce choix constitue une nouvelle façon de se redécouvrir et de réinventer leur musique, en rien une limite. Manu Louis affirme que “c’est aussi le charme de se restreindre”, Sylvain ajoute que “c’est jouer le jeu de se réinventer”. Les musiciens partagent la scène en concert acoustique, l’occasion de créer un nouveau répertoire musical, sans amplification sonore ni lumière. Cela constitue un défi de taille pour ces adeptes de musique électronique. Deux guitares sèches, un harmonium, un mini banjo, quelques instruments de percussions, une valise de vêtements se trouvent dans la remorque à l’arrière d’un des vélos.

    Manu Louis à gauche, Sylvain Chauveau, à droite, le jour de leur départ le 27 mai 2023 à Bruxelles.

    La première exigence de ce modèle de tournée consiste à faire des concerts en jauge réduite. Les trajets à vélo impliquent également des distances moins grandes entre chaque lieu de représentation, l’occasion de faire des concerts dans des lieux parfois éloignés des programmations éclectiques des grandes villes. Les artistes parcourent entre 30 et 60 kilomètres par jour, leur tournée se compose de neuf étapes :

    Cette volonté zéro carbone ne se fait pas sans mal et les artistes ont conscience des limites de leurs ambitions, Manu affirme “Zéro carbone, c’est presque un idéal qu’on entrave constamment”. La communication sur les réseaux sociaux, la création d’un site, l’après-concert constituent autant de freins à une tournée 100% décarbonée et les artistes ne se revendiquent pas comme parfaits non plus. Cette tournée pilote constitue un défi tant technique que physique, Sylvain Chauveau ironise : “nous sommes comme des footballeurs qu’on envoie sur la lune”, insistant sur le challenge que constitue cette première.

    Une volonté de ré-imaginer l’industrie musicale

    Cette tournée s’ancre plus largement dans une façon de réinventer notre rapport à la musique dans une perspective écologique. Le Zéro Carbon Records s’érige en label, en imaginant de nouveaux discours et en se servant de nouveaux outils, ce label certifie une tournée décarbonée de la part des artistes qui en font parti.

    En dehors des tournées à vélo, c’est également à la production musicale que les artistes souhaitent s’attaquer, “faire des disques sans pétrole” affirment-ils. L’idée est de ne plus avoir de production matérielle ni de diffusion numérique, toujours dans une perspective écologique. En ne faisant que de la musique live, Manu et Sylvain souhaitent revenir à une industrie musicale soucieuse de l’environnement et plus proche du public.

    Les musiciens portent avec ambition ce projet qui se veut pérenne. L’idée de tournées à vélo et d’une musique décarbonée plaît également à d’autres artistes, conscients de l’urgence climatique. Une tournée labellisée Zéro Carbon Records est prévue pour mars 2024 avec l’artiste percussionniste Julian Sartorius. Beaucoup d’idées sont également en marche : partager des partitions afin de permettre la circulation de la musique sans pour autant que l’artiste ne se déplace, utiliser des vélos couchés pour de plus longues distances, jouer avec des artistes locaux ou encore partager les instruments de musique. Beaucoup d’idées qui donnent espoir quant à la résilience de l’industrie musicale …

    Retrouvez-les le 14 juin, ils partageront leur expérience autour d’une table ronde intitulée “ Avec zéro carbon, que reste-t-il ?” au BRASS, à Bruxelles.

    Vous pouvez suivre la tournée pilote Zéro Carbon Records sur Instagram et sur leur site.

    Le détail du trajet et des lieux de représentations :

    Départ le 27 mai de Bruxelles

    Gand, Trefpunt – 28 mai

    Mouscron, La Faune – 30 mai

    Lille, Maison folie de Moulins – 3 juin

    Tournai, Silex – 4 juin

    Liège – 9 juin

    Maastricht, Lutherse Kerk – 11 juin

    Hasselt, concert d’appartement – 12 juin

    Bruxelles, Le Brass – 14 juin

  • La jeunesse récompensée pour son engagement culturel durable

    La jeunesse récompensée pour son engagement culturel durable

    C’est aux côtés de la Ministre de la Jeunesse, Valérie Glatigny, que posaient fièrement les jeunes organisateurs du GreenFeel Festival le 9 mars dernier à Bruxelles. Récompensés pour leur engagement dans l’organisation du Festival écoresponsable de Fontaine-l’Evêque, ils ont été sélectionnés comme coup de cœur parmi 39 participants par le Service Jeunesse et le Forum des Jeunes, dans le cadre de l’Année européenne de la Jeunesse.

    La Ministre Valérie Glatigny (au centre) entourée des organisateurs du GreenFeel Festival

    Cette soirée, qui a eu lieu au Grand Hospice à Bruxelles, était un moment pour mettre en lumière les initiatives et l’engagement associatif de la jeune génération. Lors de cette rencontre, les jeunes ont pu assister à un spectacle organisé par le Bureau International Jeunesse (BIJ) de la compagnie VIVANTS!

    Le Greenfeel Festival a été récompensé d’un subside de 3000 euros afin de reconduire une nouvelle édition en septembre 2023 ! La valorisation de ce projet souligne l’attention portée sur ces initiatives qui forgeront le monde culturel de demain.

    Ce prix récompense plusieurs mois de dur labeur et couronne une première expérience engagée dans le monde de la culture :

    Forcément on était surpris de voir que notre initiative a été récompensée à cette échelle ! Ça fait plaisir et ça encourage !” – Jeune organisateur

    Un Festival durable qui souligne que la jeunesse a son mot à dire

    Ce festival, engagé et porté par de jeunes organisateurs de la Maison des Jeunes Case Départ, s’est démarqué par son identité écocitoyenne et s’est concrétisée par des actions sur le terrain, véritable laboratoire des festivals de demain.

    Ce Festival a eu lieu le 17 septembre 2022 à Fontaine-L’Évèque. Il a été entièrement organisé par un groupe de jeunes avec l’appui de Livia, coordinatrice et animatrice de la MJ. Elle souligne :

    Ce festival est novateur en ce sens qu’il est fait pour les jeunes et par les jeunes !”

    L’écologie est au cœur de l’identité du Greenfeel Festival, preuve d’un engagement de la part des jeunes organisateurs. Plusieurs initiatives durables ont été mises en place. L’utilisation de jetons en fécule de pomme de terre biodégradable a permis non seulement de réduire l’impact environnemental de l’événement mais aussi de sensibiliser le public à la valorisation d’échanges locaux. La présence de toilettes sèches a évité la consommation d’eau, une option végétarienne a été proposée afin de réduire l’impact carbone de l’alimentation, les déchets ont été réduits grâce à l’utilisation de gobelets réutilisables mais aussi via le remploi de matériaux pour la scénographie et la décoration du site. L’unique goodies du festival était une carte postale à planter avec le logo du festival et les T-shirts de l’équipe bénévole ont été sérigraphiés en amont pour réduire l’empreinte carbone, les festivaliers pouvaient également repartir chez eux avec un T-shirt estampillé aux couleurs du Festival, produit avec la même technique. Enfin, les acteurs locaux étaient impliqués dans la programmation : apiculteur, productrice de fruits et jus locaux, grainothèque, sans parler de la line-up musicale qui laissait place aux jeunes talents et découvertes.

    Ça faisait sens avec l’actualité environnementale, c’était aussi logique de travailler avec des gens du coin et puis ça rassemblait des gens autour d’un projet commun qui faisait sens !”

    Et cela a visiblement porté ses fruits comme le témoigne un des jeunes organisateurs : “On a adoré que ça plaise à autant de monde, on était surpris mais super contents” – un jeune bénévole.

    Cette organisation de neuf mois a été récompensée par une belle première édition le 17 septembre 2022, certes pluvieuse mais tout de même très joyeuse ! Les jeunes organisateurs ont pu profiter de leur travail en savourant une programmation variée (concerts de rap, acoustique, stand do-it-yourself, friperie…) aux côtés de leurs proches et des habitants du village !

    J’ai adoré rencontrer les artistes du groupe Les Krackheads, c’était cool aussi de pouvoir passer en coulisse et voir ce qu’il se passe derrière !” – un jeune bénévole

    Cet événement a été accompagné par EventChange concernant les ambitions durables et écoresponsables. Cette première expérience couronnée par ce prix promet une belle édition du Greenfeel Festival en septembre 2023 !

    Oui, on est très motivés pour une seconde édition, toujours dans le thème de l’écologie !”

  • Après les gobelets réemployables, place à la vaisselle !

    Après les gobelets réemployables, place à la vaisselle !

    Si la question de l’usage de gobelets réemployables lors d’événements ou de festivals est (presque¹) acquise partout en Belgique, il en va autrement concernant la vaisselle à proprement parler. Ce qui peut sembler être un poste logistique simple à aborder de prime abord se révèle plus compliqué qu’il n’y paraît à mettre en place. À travers cette petite marche à suivre nous allons voir comment intégrer assiettes et bols réemployables à votre événement.

    Les types de vaisselle : à boire et à manger

    Avant d’aborder la question de la vaisselle réemployable, il est intéressant de faire le point sur les différentes options qui existent et les avantages et inconvénients qui en découlent. 

    1. La vaisselle à usage unique
    • La vaisselle comestible est une piste intéressante qui permet d’éviter tous déchets supplémentaires mais qui peut s’avérer coûteuse et dont il faut bien vérifier la provenance.
    • La vaisselle dite “biodégradable” peut s’avérer intéressante mais il faut bien vérifier de quoi il s’agit réellement (attention au greenwashing et au cycle de fin de vie du matériau).
    • La vaisselle compostable est une bonne solution si elle est réellement compostée. Cela nécessite donc de vérifier le cycle de fin de vie des contenants en question.²
    • La vaisselle recyclable n’est intéressante que si elle est effectivement recyclée et donc valorisée sur le territoire de votre événement. 
    • La vaisselle jetable est à éviter le plus possible. Bien que les plastiques à usages uniques soient désormais interdits, il faut absolument éviter de créer des déchets supplémentaires.

    Si certaines solutions de vaisselle à usage unique peuvent sembler intéressantes, n’oublions pas que le meilleur déchet est celui qu’on ne produit pas. Il est donc plus pertinent d’un point de vue environnemental de privilégier la pérennité des matériaux et donc de s’orienter vers des solutions de vaisselle lavable et réemployable comme décrites ci-dessous.

    1. La vaisselle réemployable
    • La vaisselle lavable (en dur) est la solution la plus écologique et la plus durable mais demande évidemment de s’intéresser à la difficile question logistique du stockage et du lavage (cfr plus bas).
    • La vaisselle lavable en plastique dur (Polypropylène : le même matériau que pour les gobelets réemployables) est aussi une solution intéressante car réemployable d’événement en événement mais demande aussi une certaine logistique et la mise en place de systèmes de caution.

    La mise en place

    Si les avancées en la matière se font graduellement, de plus en plus d’événements essaient des choses devenant ainsi des sources d’inspiration pour d’autres et documentant aussi ce qui fonctionne et ne fonctionne pas. Il est cependant important de retenir que chaque événement étant unique, la mise en place de vaisselle réemployable doit se faire au cas par cas en prenant en compte la localisation, le public, la jauge, les menus proposés et les spécificités de l’événement.

    NDLR : Nous aimerions attirer l’attention sur le fait que certains événements de par leur emplacement et site se prêtent plus facilement à la mise en place de vaisselle réemployable que d’autres. Il faut prendre en compte le type d’événement dans son contexte et tous les aspects économiques et organisationnels comme l’explique Mathieu Bogaerts de Brussels Major Events : “Il est aujourd’hui plus simple de mettre en place de la vaisselle réemployable sur un événement en site propre comme un festival fermé avec des bénévoles par exemple que lors d’une manifestation publique prenant place au cœur d’un centre urbain. Que ce soit en termes de restaurateurs (nombre fixe), de gestion des quantités de contenants ou de récupération de ceux-ci par exemple.

    Quelques exemples : 

    En Wallonie, le festival l’Amour en vers, déjà fortement impliqué dans une démarche durable, sert tous les repas du festival dans des contenants lavables durs et fonctionne avec un système de lavage en interne grâce à l’aide de bénévoles.

    Le festival LaSemo fonctionne avec de la vaisselle réemployable depuis 2021. Accueillant près de 30 000 festivaliers, le festival situé dans le parc d’Enghien loue l’ensemble des contenants auprès d’un fournisseur extérieur qui se charge aussi du nettoyage de ceux-ci. Ce changement à permis au festival de générer 2,8 fois moins de déchets organiques, sachant qu’il fonctionnait uniquement avec de la vaisselle compostable (jetée dans la fraction organique) avant 2021.

    A Bruxelles, un test financé par Bruxelles Environnement suite à un appel à projet “climat” a permis au BME de mettre en place de la vaisselle réemployable pour la première fois sur le site de Plaisirs d’Hiver lors de son édition 2023. Ce premier test a fonctionné avec 12 commerçants sur la place De Brouckère avec l’intention d’élargir celui-ci à 35 commerçants en 2024. La question épineuse qui doit encore être solutionnée pour BME est le coût humain qu’implique d’avoir du personnel de gardiennage pour les cautions et du personnel pour la récupération des contenants. Ils travaillent d’ailleurs avec leur fournisseur sur la mise en place de machines automatisées pour la récupération des contenants qui seraient affublés d’une puce RFID.

    En Flandre, le Paradise City Festival (près de 30 000 festivaliers en 2022) a mis de la vaisselle réemployable en place sur l’ensemble du site en 2022. Les 6800 contenants en polypropylène ont permis une baisse de 275kg de déchets résiduels³ par rapport aux années précédentes.

    Le Marché de Noël d’Anvers fonctionne aussi avec de la vaisselle réemployable en polypropylène depuis 2023. Les organisateurs ont pris le parti d’imposer ce mode de fonctionnement à l’ensemble des foodtrucks/restaurateurs présents sur le site. Le grand changement pour l’année prochaine “sera de fonctionner avec un point de collecte central pour récupérer la vaisselle. Ils se sont rendu compte que le fait de ramener les contenants auprès de chaque stand compliquait les choses et posait des questions d’un point de vue hygiène” explique Christophe Lampertz de Re-uz. 

    En France, les exemples aussi se multiplient (notamment depuis l’introduction de la nouvelle loi du 1er Janvier 2023⁴) : Le festival WE LOVE GREEN a décidé de faire un test avec 10 restaurateurs en attendant d’étendre le concept de leurs “menus 100% végé dans des contenants 100%” réemployables à l’ensemble des restaurateurs du festival l’année prochaine.

    Autre exemple avec une jauge plus réduite : le festival des Pluies de Juillet n’a pas attendu l’entrée en vigueur de la loi française pour mettre en place un système avec de la vaisselle traditionnelle et impliquer directement les festivaliers pour le lavage. Ainsi, chacun fait sa vaisselle permettant une réutilisation des contenants et une sensibilisation du public.

    En Suisse, le Paléo festival (300 000 festivaliers en 6 jours en 2022) est passé entièrement à la vaisselle réemployable en 2022. En matière de staff, cela implique 300 personnes dédiées au ramassage, lavage et remise en circulation des gobelets et éléments de vaisselle réemployable pour le plus grand festival de Suisse. Depuis 2022, c’est la location de la vaisselle réemployable qui a été privilégiée en attendant de tirer les conclusions de cette expérience à grande échelle. Le site Blick a d’ailleurs réalisé une petite vidéo sur les coulisses de la vaisselle au Paléo.

    Concrètement : 

    La mise en place de vaisselle réemployable (traditionnelle ou en plastique dur) demande de bien réfléchir en amont et de répondre à quelques questions⁵. 

    1. De quoi a-t-on besoin ?

    C’est la première étape de la mise en place de vaisselle réemployable sur votre événement. En fonction de la jauge de ce dernier, du type de nourriture servie et de la manière dont vous fonctionnez (prestataires extérieurs pour l’alimentation ou gestion interne), il est important d’évaluer les quantités de vaisselle dont vous avez besoin et aussi ce dont vous n’avez pas besoin.

    À partir de là, se pose la question du type de vaisselle utilisée : 

    • Que ce soit pour un catering artiste ou pour l’espace équipe/bénévole, ou même sur un événement de taille réduite⁶, vous pouvez plus facilement récupérer de la vaisselle traditionnelle en seconde main ou via des dons afin de l’utiliser lors de votre événement. Après, il faut envisager la question du lavage que nous aborderons plus bas.
    • Si pour des raisons de jauge, de quantité ou de sécurité, la vaisselle traditionnelle ne semble pas être une option viable, la vaisselle réemployable en plastique dur est la meilleure solution. 
    1. Acheter de la vaisselle ou louer ?

    Il devient véritablement intéressant d’acheter votre propre vaisselle (traditionnelle ou en plastique dur⁷) à partir du moment où vous en avez une utilisation régulière⁸. Si vous organisez un événement par an, il est préférable de la louer car l’achat implique aussi de gérer le stockage. Il est aussi important de privilégier la vaisselle non floquée car elle permet d’être réemployée lors de différents événements. Une bonne piste peut aussi être de co-financer un achat de vaisselle avec d’autres événements afin que celle-ci tourne un maximum en fonction des besoins de chacun, la rendant ainsi plus durable et demandant un investissement moindre.

    Aujourd’hui, de nombreuses entreprises proposent aussi la location de vaisselle traditionnelle et/ou en plastique dur (Polypropylène). Si l’offre pour la vaisselle en plastique dur en Belgique concerne encore principalement les gobelets, elle se développe peu à peu et de nouveaux partenaires potentiels voient le jour. De nombreux professionnels de l’HORECA et de l’événementiel proposent déjà, et depuis longtemps, de la vaisselle traditionnelle en location. Si le prix de ces dernières est souvent abordable, il faut faire attention aux cautions qui peuvent, à l’inverse, être chères.

    1. Et le lavage dans tout ça ?

    Si un événement de taille plus réduite peut plus facilement gérer le nettoyage de sa vaisselle, plus les jauges augmentent, plus il devient logistiquement compliqué de gérer sa vaisselle en interne. C’est pourquoi aujourd’hui, les fournisseurs de vaisselle proposent souvent de se charger du nettoyage de la vaisselle moyennant une compensation financière. Voici différents scénarios possibles : 

    • Vous possédez votre propre vaisselle (traditionnelle ou en polypropylène) :
      • Vous avez une jauge relativement réduite et elle est entièrement gérée par des bénévoles ou par les festivaliers (chacun nettoie son assiette comme aux Pluies de Juillet par exemple). L’avantage est que cela demande une équipe réduite de bénévoles, quelques stands de vaisselle et une signalétique adaptée.
      • Vous avez une jauge significative et décidez de gérer votre vaisselle en interne. Il vous faudra donc une équipe de bénévoles conséquente (exemple des 300 bénévoles dédiés uniquement à ce poste au Paléo Festival) et une véritable installation professionnelle de lavage (tunnels dédiés et tournantes d’équipes 24h/24).
      • Vous avez une jauge significative et décidez de déléguer le nettoyage de votre vaisselle vers des partenaires spécialisés. Vous devez avoir une équipe pour le ramassage, le comptage mais aussi prévoir suffisamment de quantités pour être certains de ne pas manquer de contenants pour tenir jusqu’à la fin de votre événement.
    • Vous louez la vaisselle (traditionnelle ou en polypropylène) auprès d’un fournisseur :
      • Celui-ci peut se charger du nettoyage de la vaisselle en échange d’une participation financière (pour la vaisselle en polypropylène il faut compter environ 10 centimes par contenant à nettoyer). Il faut alors prévoir des espaces de stockage sécurisés pour les caisses pleines de vaisselle propre et de vaisselle sale.
      • Vous pouvez vous charger vous même du nettoyage et cela implique de mettre en place une logistique adaptée avec des lave-vaisselles sur site et des bénévoles comme expliqué ci-dessus. 
    1. Un système de caution

    La vaisselle réemployable coûte cher (aussi bien à l’achat qu’à la location) et le système qui semble faire l’unanimité pour éviter d’en perdre est la mise en place de caution. Ainsi, le Paradise City Festival notait dans son rapport de l’édition 2022 une perte de 0,9% des contenants sur l’ensemble du festival. Le système en tant que tel n’est pas compliqué à mettre en place : 

    • Distribution de contenants aux restaurateurs/foodtrucks
    • Ajout du montant de la caution lors du paiement du plat (2€ par exemple)
    • Récupération des contenants à un endroit spécifique et retour de la caution au festivalier
    • Remboursement par les restaurateurs/foodtrucks de la caution aux organisateurs en fonction du nombre de contenants distribués

    Ce dernier demande cependant une bonne organisation et surtout une bonne communication avec l’ensemble des parties prenantes. C’est pourquoi il peut être intéressant d’inclure ce processus au sein des contrats et/ou d’une charte spécifique dédiée aux restaurateurs/foodtrucks en amont de l’événement.

    Un exemple type de mise en place

    Le Festival A, qui accueille 10 000 festivaliers par jour et une trentaine de foodtrucks/restaurateurs sur site, fonctionne avec de la vaisselle réemployable en polypropylène louée auprès d’un fournisseur. Chaque contenant coûte 15 centimes à la location auquel il faut rajouter 10 centimes de lavage. Le Festival A a mis sur pied une charte qui impose l’utilisation de ces contenants réemployables aux foodtrucks/restaurateurs présents lors de l’événement. Chaque foodtruck est contacté individuellement pour lui expliquer la marche à suivre et le sensibiliser aux effets positifs de ce dispositif. Ils ont aussi l’obligation de fournir (au besoin) des couverts compostables qui peuvent être jetés dans des composts⁹. Sur site, les foodtrucks se procurent des contenants auprès de l’organisation pour servir leurs plats au festivaliers. Les festivaliers s’acquittent du prix du plat ainsi que d’une caution de 2€ par contenant. Cette caution sera récupérée par le festivalier lorsqu’il ramènera son contenant vide au stand prévu à cet effet après avoir mangé. A la fin du festival les différents foodtrucks rembourseront les cautions perçues à l’organisation du festival pour chaque contenant distribué aux festivaliers. L’ensemble des contenants sales sont stockés dans un espace sécurisé, comptabilisés, puis renvoyés au fournisseur qui se charge (dans ce cas-ci) du nettoyage de ces derniers. Le Festival A fonctionne avec plusieurs tournantes de deux bénévoles pour assurer la récupération des contenants dans les deux stands prévus à cet effet et la distribution de contenants auprès des restaurateurs qui en auraient besoin.
    Cet exemple n’en est qu’un parmi tant d’autres et peut évidemment être adapté en fonction des besoins de chaque organisateur, de la taille de son événement et des différents prestataires et/ou fournisseurs étant parties prenantes. 

    Les conseils des pros – entretiens avec Christophe Lampertz de Re-Uz et Mathieu Bogaerts de BME

    Christophe Lampertz, de l’entreprise Re-Uz, a quelques conseils pour ceux qui souhaitent se lancer dans les gobelets ou la vaisselle réemployable : “Déjà, il faut s’y prendre à l’avance et surtout prendre le temps de le faire pour bien le faire. Les gens pensent souvent que c’est très simple à mettre en place mais il y a toute une logistique à prendre en considération. Il faut qu’ils contactent des spécialistes et qu’ils écoutent les conseils. Un exemple tout bête que je donne souvent c’est d’afficher les prix caution comprise. Cela facilite la vie des bénévoles et/ou restaurateurs qui servent la nourriture et les boissons. Un autre conseil pratique est de faire payer la caution à absolument tout le monde, c’est-à-dire le staff aussi. On se rend compte, suite à des essais avec des contenants de couleurs différentes pour les festivaliers et les bénévoles, que c’est lorsqu’il n’y a pas de caution qu’on dénombre des pertes de contenants. S’il n’y a pas de caution les gens ne respectent malheureusement pas le matériel.

    Pour Mathieu Bogaerts de BME : “Pour les gobelets, il faut arrêter d’avoir peur et de croire que c’est vraiment compliqué, si on trouve le bon partenaire ca roule tout seul. Pour ce qui est de la vaisselle réemployable on est encore en phase de test et il y a en effet plus d’implications mais de toute façon, tout ce que je peux conseiller aux gens et organisateurs c’est d’anticiper : soyez prêts parce que de toute façon ça va arriver.”

    Les partenaires et liens intéressants : 

    Gobelets et vaisselle réemployablesRe-Uzhttps://www.reuz.com/
    Gobelets réemployablesEcocuphttps://www.ecocup.be/fr/
    Gobelets réemployablesRekwuphttps://www.rekwup.be/
    Gobelets réemployablesBeeyohttps://beeyo.be/
    Gobelets réemployablesTibihttps://www.tibi.be/
    Gobelets réemployablesCharleroi Nature asblhttps://www.chana.be/?Services
    Gobelets réemployablesWakecuphttps://www.greenfunsolutions.be/fr/
    Gobelets et vaisselle réemployablesCup Concepthttps://cupconcept.com/be-fr/
    Gobelets réemployablesFesticuphttps://www.festicup.be/
    Gobelets réemployablesMake Your Cuphttps://www.makeyourcup.be/
    Gobelets réemployablesIpallehttps://www.ipalle.be/reduire-ses-dechets/location_gobelets_réemployables/
    Gobelets réemployablesEtacuphttp://www.etacup.be/
    Gobelets réemployablesGroupe La Lorrainehttps://www.lalorraine.org/fr/nettoyage/lavage-et-mise-a-disposition-de-gobelets-réemployables
    Gobelets réemployablesEcoverrehttps://www.ecoverre.com/
    Gobelets réemployablesBiopackhttps://www.biopack.be/fr/
    Gobelets réemployablesProvince de Liègehttps://www.provincedeliege.be/fr/node/15414
    Gobelets réemployablesIPIC Plastichttps://ipicplastic.be/fr/
    Gobelets réemployablesSappihttps://www.sappi.com/fr
    Gobelets réemployablesMj-musichttps://www.mj-music.be/gobelets-réemployables/
    Gobelets réemployablesLe guide qui rend ton évènement plus écocitoyenhttps://www.eventecocitoyen.be/nourriture-boissons/choix-gobelets-vaisselle-bouteilles/
    Gobelets réemployablesCupStackhttps://cupstack.nl/#
    Gobelets et vaisselle réemployablesCup&Morehttps://www.cupandmore.ch/de/miete
    VaisselleSaberthttps://www.sabert.eu/fr/
    VaisselleEcopoonhttps://www.ecopoon.be/fr/accueil.htm
    VaisselleAssiettes Comestibleshttps://www.assiettes-comestibles.com/
    Gobelets réemployablesNektohttps://www.nekto.be/lavage-de-gobelets-réemployables
    Contenants durablesMonousohttps://www.monouso.be/
    Contenants durablesFiesta Green
    Contenants réemployablesOuikithttps://www.zerowastefrance.org/wp-content/uploads/2017/05/diffusion-ouikit.pdf

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    ¹ Malgré la législation en place, certaines exceptions ont été accordées par les différents gouvernements belges concernant les gobelets réemployables, notamment pour ce qui est de “terminer les stocks de gobelets jetables encore existants”. Vous pourriez donc encore tomber sur des gobelets jetables lors de certains événements en 2023… De plus, comme le déplore Mathieu Bogaerts de BME : “Il n’y a absolument aucun contrôle de la part des autorités, il commence heureusement à avoir des attentes de la part du public ceci dit.
    ² Un exemple : le festival Esperanzah! en 2022 broyait les cartons/papiers et la vaisselle biodégradable sous forme de copeaux pour les réutiliser dans les toilettes sèches.
    ³ Soit l’équivalent de 740kg de CO2
    « La vaisselle jetable est interdite dans les établissements de restauration rapide servant plus de 20 couverts simultanément, pour tout ce qui est consommé sur place : les repas sont désormais servis dans de la vaisselle lavable et réemployable »
    ⁵ Le Collectif des Festivals (France) à d’ailleurs développé un flowchart en 2017 très intéressant et facile pour bien choisir  la vaisselle adaptée à son festival.
    ⁶ Ce qui est mis en place au festival “C’est pas d’la carotte” à Huy ou aux “Pluies de Juillet” en France par exemple.
    ⁷ Les contenants en plastique dur dédiés à la vente sont fabriqués en ABS et non en Polypropylène pour des raisons d’étanchéité des couvercles.
    ⁸ Par exemple, les gobelets doivent être utilisés environ 7 fois pour que le bénéfice écologique soit réel. Ils peuvent néanmoins être lavés jusqu’à 150 fois comme l’explique, notamment, cette vidéo du Collectif des Festivals.
    ⁹ La mise en place de couverts réemployables se heurte à des difficultés logistiques énormes pour les fournisseurs. “Notamment par le fait que ça représenterait des investissements gigantesques en matière de lave-vaisselles industriels qui sont tout à fait différents de ceux qu’on a déjà et pour lesquels on ne reçoit aucun subside aujourd’hui” explique Christophe Lampertz de Re-Uz.

  • [Vidéo] Penser la résilience écologique du secteur culturel par David Irle

    [Vidéo] Penser la résilience écologique du secteur culturel par David Irle

    Découvrez en vidéo la conférence présentée par David Irle lors du Forum de la Culture Durable qui s’est tenu au Delta à Namur le 22 novembre 2022.

    Retrouvez l’ensemble des ressources du Forum de la Culture Durable, dont les slides de cette conférence, ici.

    Stéphanie Lefevre a réalisé une infographie à propos de cette conférence :

  • Pour des politiques culturelles orientées transition durable

    Pour des politiques culturelles orientées transition durable

    Le secteur culturel s’est toujours emparé des enjeux de société. Aujourd’hui, face à l’enchaînement de crises sociales, environnementales et économiques, il a plus que jamais, un rôle essentiel à jouer. C’est la transition durable¹ de et par la culture dont il est question². Car si le secteur est bien évidemment, comme tant d’autres, fortement dépendant des énergies fossiles, beaucoup s’accordent aujourd’hui à dire que les arts et la culture sont investis d’une responsabilité plus grande, celle de montrer la voie, d’être les moteurs de la transition.

    À l’aune d’une seconde édition du Forum de la Culture Durable³, des premiers bilans de deux ans d’accompagnement de structures et événements culturels, de rencontres avec des expert·e·s, de participations à des colloques en Europe et en vue des élections de 2024, EventChange rédige une série de recommandations à l’attention du monde politique pour accélérer, faciliter et étendre la transition durable du secteur culturel belge.

    Avec une approche intersectorielle, ce document se veut coller au mieux à la réalité de terrain du secteur culturel en Fédération Wallonie-Bruxelles et faire écho aux besoins, freins et opportunités auxquels sont confronté·e·s les professionnel·le·s du secteur dans son ensemble.

    Cette série de recommandations n’est pas exhaustive et entend principalement servir de ligne conductrice pour de futures politiques culturelles tout en soulignant les points les plus urgents à adresser. Il convient donc de poursuivre le travail de concertation entre le secteur et le monde politique (et administratif) sur tous les aspects de la transition durable de la Culture. De plus, siles recommandations décrites dans ce document reflètent la réalité des acteur·rice·s belges, elles doivent être lues dans un contexte plus large de réflexion à l’échelle européenne et internationale.

    FORMER

    La demande de formation est aujourd’hui une réalité du secteur quand on aborde les enjeux de transition durable. Fédérations, structures, acteur·rice·s ont un besoin d’informations, de connaissances et d’expertises en la matière afin d’entamer leur démarche. Or ces formations doivent être mieux financées, doivent répondre à des besoins spécifiques, être adaptées et adaptables aux réalités des structures et des lieux. L’accès à la formation demeure encore trop inégal.

    • Développer une offre de formation sur la transformation écologique du secteur (et transition durable au sens large)
    • Former et outiller les directions et postes de décisions de manière systématique au sein de l’ensemble des structures et institutions culturelles
    • Accompagner le secteur dans la double démarche d’atténuation des impacts et d’adaptation aux crises⁴
    • Mettre des éco-conseiller·e·s à disposition des structures et des opérateur·rice·s culturel·le·s pour pallier au manque de connaissances, apporter une méthodologie et des outils concrets
    • Former le personnel de l’administration générale de la culture et les instances d’avis aux enjeux du développement durable dans le secteur
    • Accompagner les acteur·rice·s de manière individuelle et collective autour de plans d’action pluriannuels

    MUTUALISER

    Le secteur culturel a besoin d’avancer ensemble sur le chemin de la transition durable. Il convient de sortir des logiques individualistes et concurrentielles qui animent notre société afin de travailler main dans la main. Pour ce faire, il faut partager, mutualiser et diffuser les connaissances et les bonnes pratiques existantes de manière soutenue et systématique.

    • Créer un cadre pour la procédure de prêt et de don de matériaux et de ressources entre les structures et institutions culturelles
    • Soutenir de manière structurelle, structurée et systématique les initiatives de mutualisation et valoriser le maillage territorial
    • Développer les métiers mutualisés comme celui d’éco-conseiller·e pour plusieurs structures culturelles
    • Décloisonner les secteurs et créer plus d’échanges intersectoriels
    • Mutualiser les analyses et les plans de mobilité de l’ensemble du secteur pour atténuer ce qui représente le plus grand impact en matière d’émission de gaz à effet de serre

    REPENSER

    Pour accélérer de manière tangible la transition du secteur culturel, des modifications profondes doivent survenir au sein de l’administration et des pouvoirs décisionnels. Toute une série d’aspects de la manière dont le secteur fonctionne doivent être repensés dans une logique durable.

    • S’éloigner des seules logiques chiffrées d’évaluation et se tourner vers une évaluation qualitative tenant compte des impacts sociaux et environnementaux
    • Engager la politique locale à développer des marchés publics durables et prendre en compte l’urgence environnementale dans ses appels à projets
    • Continuer la réflexion et le dialogue avec l’ensemble de la filière culturelle sur la question de l’éco-socio conditionnalité des subsides et de sa mise en oeuvre de manière équitable⁵
    • Repenser certains pans de la réglementation liée au Tax Shelter pour qu’elle soit plus en phase avec les urgences environnementales et les principes de l’économie circulaire
    • Se donner le temps de repenser un modèle de financement du secteur équitable et en phase avec les enjeux environnementaux et sociaux
    • Ancrer de manière structurelle les processus de transition dans du long terme, cesser d’être dans des objectifs et des demandes de résultat uniquement sur le court terme
    • Faire des enjeux de durabilité des valeurs fondamentales intégrées aux missions des structures et institutions culturelles et permettre le temps de leur mise en oeuvre
    • Faire davantage confiance aux utilisateur·rice·s des lieux culturels et aux artistes : iels sont les mieux placé.e.s pour connaître leur lieux et leurs besoins mais aussi agir en conséquence
    • Encourager et soutenir la diffusion plus longue des créations
    • Prendre en compte le fait que beaucoup de structures et institutions culturelles sont tributaires de ce qui existe sur leur territoire et réfléchir à la mise en place d’alternatives (mobilité)

    COOPÉRER

    Face à l’urgence environnementale et sociale, la dynamique ultra concurrentielle et de compétition qui existe entre les structures culturelles et lieux doit céder la place à une volonté de coopération, de partage, de mise en commun, de réseaux et de collectifs.

    • Renforcer le dialogue interministériel pour répondre aux enjeux actuels du secteur : culture, mobilité, énergie, développement durable, etc.
    • Faciliter le dialogue et les échanges entre institutions / entreprises publiques et les structures et lieux culturels afin de mener à bien leurs initiatives durables (notamment en matière de mobilité)
    • Encourager les collectifs, les mises en réseaux, les lieux et temps d’échanges et de rencontre, soutenir les initiatives d’articulation et de décloisonnement
    • Intégrer les différents maillons de la filière (de la création à la diffusion) dans une réflexion collective et collaborative autour des enjeux de durabilité dans le secteur
    • Renforcer les logiques de programmation et de diffusion collective (notamment en matière de clauses d’exclusivité)
    • Mettre à disposition des espaces et du temps pour repenser nos imaginaires et des futurs désirables
    • Valoriser les tournées à mode doux et prendre en charge les dépenses liées aux déplacements des artistes et autre rôles liés à de tels exercices
    • Financer et valoriser les périodes liées aux résidences d’artistes et le temps consacré à la médiation culturelle sur un territoire

    EventChange se tient à disposition des pouvoirs publics, administrations et toutes parties prenantes pour les accompagner dans leurs réflexions sur le sujet et dans la mise en œuvre concrète d’un plan d’action adéquat. EventChange possède, depuis 2021, une expertise sur les enjeux de la transition durable de et par la culture et travaille dans ce contexte avec de nombreux·se·s acteur·rice·s et spécialistes du secteur.

    Le document en version PDF

    Mars 2024


    ¹ Il faut comprendre la notion de durable au sens large : une culture durable prend notamment en compte les enjeux d’économie du territoire, de transition écologique, d’inclusion et de création de lien social.

    ² Pour reprendre les mots de David Irle, Rapport du Forum de la Culture Durable 2023

    ³ Le Forum de la Culture Durable 2023 s’est tenu à l’EDEN, Centre Culturel de Charleroi le 5 décembre 2023.

    ⁴ Cfr l’explication de la double démarche par David Irle lors du Forum de la Culture Durable 2023

    ⁵ Cfr la table ronde « Eco-conditions dans les financements publics : quelles perspectives ? » menée avec l’administration lors du Forum de la Culture Durable 2023

  • Vers un numérique durable et partagé dans nos musées 

    Vers un numérique durable et partagé dans nos musées 

    Ce webinaire, organisé par le Palais des Beaux-Arts de Lille le 31 janvier 2025, posait la question de la gestion du numérique, devenue indispensable, dans une optique de transmission, en faisant face aux enjeux énergétiques d’aujourd’hui ?

    Pour introduire cette thématique, la première invitée était Bela Loto-Hiffler avec une intervention sur Un numérique plus responsable est-il possible ?

    Fondatrice et présidente de Point de M.I.R, dont l’objectif est de rendre visible la matérialité du numérique, elle se définit comme Observatrice attentive de l’ébriété numérique, désespérée dynamique, pour la décroissance numérique.

    Elle interroge la question cruciale de savoir s’il est possible de faire toujours plus en faisant du numérique vert ?  

    Le musée, acteur de conservation du « beau » aurait alors une place à prendre pour réfléchir à sa conservation, dans un monde en accélération, et à interroger les effets délétères de ces nouvelles pratiques. La cohérence des missions muséales est à ce prix.

    Elle revient sur la notion de responsabilité en insistant sur le fait qu’il est impropre de parler « d’impact du numérique » ; il faudrait davantage parler de « coût » pour souligner le prix à payer derrière l’emploi de cet outil. Les notions de risques et d’externalités négatives soulignent la violation des droits qui sont invisibilisés. En effet il y a davantage que l’aspect environnemental,  parfois mieux connu du grand public ; les questions de l’exploitation des mines et de ses effets sur la destruction de paysages, l’exploitation de ressources abiotiques tel que l’eau – toujours au détriment des populations locales qui vivent dans des conditions d’aridité extrêmes -, ou encore la question des décharges avec des effets catastrophiques sur la pollution du sol, de l’eau, de l’air, et de son coût sanitaire auprès des populations résignées à trier nos déchets pour survivre.

    Le Red IT (par opposition au Green IT – numérique vert) a également d’importants coûts sociaux ; des chaînes de travail – géré dans les conditions les plus extrêmes du taylorisme-, au travail -déshumanisé et sous-payé des travailleurs du clic- destiné à alimenter nos plateformes de données -notamment de l’IA-… Bela Loto-Hiffler revient sur le coût humain qui se cache derrière l’exploitation des mines. L’extractivisme de cette réalité minière, avec un minerai qu’elle qualifie « de sang et de conflit », est un enjeu économique considérable qui suscite le financement de conflits armé et la mise en place d’une criminalité systémique dont un des effets est l’emploi du viol comme « arme de destruction massive » dans des pays tels que la RDC (voir : Génération Lumière). Il n’existe pas de mine durable ou responsable.

    La question unique du coût climatique et environnemental est donc réductrice. Il faut penser la question des coûts numériques comme une question systémique.

    Il est bon de faire du numérique durable mais il est avant tout essentiel de réfléchir sur son bien-fondé et ne plus faire de l’IT as usual.

    Bela Lotto-Hiffler nous invite à faire appel à l’IA : l’Intelligence Artistique ; à ralentir, à faire moins ; à sortir de l’idée que résoudre cette question est une question technique. En rappelant qu’il s’agit davantage d’une question philosophique et politique ; Quel numérique peut-on rêver ? Dans quel monde souhaitons-nous vivre et quels futurs souhaitons-nous construire ?

    Nous avons ensuite pu entendre Omer Pesquer et Agnès Abastado dans leur intervention sur Le musée, acteur de la sobriété numérique ? qui, face à l’omniprésence du numérique dans les musées, reviennent sur cette question de l’impact caché du numérique au niveau environnemental, notamment en soulignant la présence des serveurs installés massivement sur les territoires américains avec une énergie lourdement carbonée.

    Ici aussi, la question de la conciliation entre les exigences d’innovation et le coût du numérique est présente.

    Un rappel que le numérique n’est pas « magique » et qu’après l’avoir longtemps considéré comme un outil immatériel et techno solutionniste, nous sommes faces à des externalités négatives très concrètes.

    Après l’appel de Bela Loto-Hiffler à « faire moins », Omer Pesquer et Agnès Abastado nous invitent à intégrer d’autres solutions, qui, si elles ne sont pas miraculeuses, permettent néanmoins une amélioration de nos pratiques :

    • Former et sensibiliser à travers des fresques du numérique
    • Évaluer son empreinte carbone, mais avec des points qui restent contre-intuitifs et avec les limites de ce système ;
    • Optimiser son usage face à des programmes qui ralentissent plus rapidement ;
    • Prévoir des budgets de maintenance plus importants pour permettre aux outils d’être plus durables dans le temps ;
    • Penser LES numériques ; aller voir du côté du low-tech, du slow-tech, du small-tech, mid-tech, retro-tech (voir Regenbox), rebel-tech… et le permacomputing ; 
    • Suivre des formations en écoconception, en accessibilité ;
    • Suivre le Lab numérique des Augures ;
    • Cartographier les flux (notamment via Ecoact)
    • Penser les politiques d’achat de matériel non pas sur base de la question des coûts mais sur la base des questions d’utilisation, quitte à payer davantage pour de la location.

    Et Omer Pesquer de résumer, en rappelant qu’il devrait aussi être question de renoncer à des projets et de communiquer sur nos erreurs. C’est cette communication qui permettra à d’autres d’éviter de les reproduire.

    Enfin, d’autres interventions ont mis en avant l’apport des outils de médiation numérique dans l’approche des publics à besoins différenciés.

    L’une d’elle ; Pour une médiation numérique partagée, l’accessibilité en question, animée par Cindy Lebat (Docteure en muséologie et chercheuse) et Mathilde Teissier (Chargée de médiation au Musée de la Marine) revenait sur les processus de création d’outils de médiation numérique au Musée de la Marine et sur leur appropriation par des publics atteints d’handicaps.

    En revenant sur l’importance pour le visiteur de se sentir invité et parfaitement intégré au sein de l’environnement muséal, elles insistent sur la nécessité d’impliquer les publics dès la conception, avec la mise en place de tests auprès de publics variés ; tant des publics habitués aux dispositifs muséaux, que des publics moins habitués, pour valider l’approche physique des dispositifs, confirmer les fonctionnalités contenues mais aussi trouver la bonne temporalité.

    Elles insistent sur la nécessité de créer un contenu numérique qui permette d’optimiser l’expérience du visiteur en situation de handicap, en réfléchissant à quelle est leur pratique pour apporter une réponse adaptée et leur permettre de gagner en autonomie ; L’autonomie comme liberté de choix dans la façon dont la personne se saisit d’un outil ou d’une ressource plutôt que dans la question du « faire seul ».

    Le numérique ici se positionne comme un outil permettant de favoriser l’estime de soi en offrant non seulement un accès mais surtout un accès digne grâce à une qualité d’usage équivalente.

    Elles nous invitent à anticiper la création de ces médias dans un paysage muséal ou 1/3 seulement des institutions proposent des dispositifs d’accessibilité.

    Nous avons ensuite eu une présentation du numérique vu à l’étranger, avec la dernière conférence de la journée ; D’autres perspectives : Le numérique responsable et inclusif vu de l’étranger où nous avons notamment pu écouter l’intervention de Jane Alexander du Cleveland Museum of Art et celui de Leïla Afriat, du Musée McCord Stewart à Montréal.

    Leila Afriat nous a présenté l’initiative autochtone Uhu Labo nomade qui permet, à travers la numérisation d’une pièce des collections issues du patrimoine des Premières Nations, de réécrire l’histoire de celui-ci, à travers un travail de numérisation effectué par des jeunes issus de ces communautés, dans un contexte de fracture numérique et de perte d’identité.

    Ce travail permet une transmission intergénérationnelle des savoirs autochtones et une réappropriation, tant de leur histoire que du travail réalisé.

    Enfin, nous avons évoqué la situation du numérique dans les musées belges et le travail de sensibilisation et de formation réalisé par EventChange. Des groupes de travail organisés en 2024 autour du numérique responsable ont questionné les pratiques de l’écoconception, celles de la communication digitale et de la médiation. Le fil rouge qui est ressorti de ces rencontres a été celui de questionner les usages, les repenser, faire « moins mais mieux » pour gagner en efficacité et alléger son impact environnemental. L’écoconception, qui favorise l’ergonomie des sites internet, permet également de se rapprocher du public. En Belgique, une étude de la Fondation roi Baudouin datée de 2023, révèle que 4 belges sur 10 sont aujourd’hui en situation de vulnérabilité numérique (Vanessa Bebronne – EventChange).

    Estielle Vandenweeghe, responsable communication à Centrale for contemporary art de la Ville de Bruxelles a quant à iel expliqué comment sa stratégie avait été adapté ; partant d’une analyse carbone, le choix des réseaux de communication a été repensé, en diminuant également le nombre de publications, tant papier que numérique, mais aussi avec une grande importance accordée à l’inclusion et l’accessibilité. L’ensemble de cette stratégie, repensée pour faire « moins mais mieux » s’avère efficace : le public est présent et la fréquentation de Centrale est en augmentation.

    Retrouvez l’ensemble des conférences enregistrées ici :

    A lire ou voir, conseillés par les différent·es conférencier·es :

    • Corinne Morel Darleux, La dignité du présent
    • Sasha Lucciani, AI is dangerous, but not for reasons you might think. (également en français)
    • Fanny Lopez & Diguet Cécile, Sous le feu numérique: Spatialités et énergies des data centers, 2023
    • Tristan Nitot
    • Léa Mosesso, Vivre avec un smartphone obsolète, 2023
    • Olivier Hamant, Antidote au culte de la performance, 2023
    • Jérôme Denis & David Pontille, Le soin des choses, 2022
    • Nicolas Nova, Futurs ? La panne des imaginaires technologiques, 2014
    • Alexandre Monnin, Politiser le renoncement, 2023
    • Le rapt d’Internet : Manuel de déconstruction des Big Tech, ou comment récupérer les moyens de production numérique, 2025

    Un article écrit par Vanessa Bebronne.